N°127 Fevrier 2000

Le LIbérateur journal de la Croix Bleue

Editorial

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La souffrance n'a pas le droit de régir ma vie

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La souffrance est un thème sérieux, grave, pas facile à étudier, mais elle est universelle et touche, avec plus ou moins d'intensité bien sûr, chacun d'entre nous, à un moment ou à un autre de sa vie.
La souffrance entre dans le domaine des sensations. "J'ai mal" ou "Je suis mal" ou "Je vais mal"… sont autant d'expressions de ce ressenti, un début de travail "raisonné" sur la sensation.
Elle est aussi quelque chose qui m'appartient. Elle n'est pas toujours perceptible par mon entourage. Elle se limite à mon individu. Je suis seul à la ressentir comme je la ressens.
Bref, la souffrance est là, de quelque nature qu'elle soit. Alors, qu'est-ce que j'en fais?
- Je l'endure… en silence… je pleure parfois ou je deviens dur avec moi-même.
- Je la hurle avec révolte…
- Je trouve des "produits" pour ne plus rien ressentir, pour que mon cerveau ne transmette plus cette douleur. Je n'ai peut-être pas conscience alors que la dépendance à ces drogues engendre une souffrance de plus comme l'illustrent les témoignages.
- Je me plains auprès de mon entourage… qui finit par me fuir…
- Je décide de me battre, de vaincre ce mal qui me ronge en employant les grands moyens : toutes mes forces, toute ma volonté, toute ma raison et j'appelle… Qui?… Qui peut m'aider? Les spécialistes? Un médecin comme le Docteur Servant à la clinique de l'Anxiété à Lille, un psychologue… Mes proches? Mon meilleur ami? Mon Association?
Face à la douleur de l'autre qui appelle, qui s'exprime, qui me raconte ce qu'il ressent, je suis limité : je ne peux ressentir exactement la même chose que lui. La douleur est indicible. Il peut me dire clairement ce qui ne va pas et pourquoi ça ne va pas mais ce qu'il ressent vraiment, l'intensité de cette souffrance, il aura du mal à me le transmettre.
Mais je peux écouter, comprendre et "compatir" ; mot qui signifie littéralement "souffrir avec", parce que j'ai une expérience de la souffrance en général.
Partager la souffrance de l'autre et donc l'en décharger pour partie au moins, est-ce possible? Je crois que c'est l'écoute, l'amitié ou l'amour que l'on apporte qui entrent en jeu et multiplient les forces de celui qui lutte. Mon regard extérieur peut aussi, bien sûr, me permettre d'agir sur les causes, de régler certains problèmes, de soigner, de soulager…
Face à la sensation parfois horrible, insupportable de la "souffrance – maladie", comme celle dont nous parle Bernard ou "souffrance - mal-être", comme celles entendues à S.O.S. Amitié, nous devons lutter ensemble et rassembler nos forces, unir nos volontés. Nous devons aussi faire triompher la raison et essayer de comprendre le sens de la souffrance (ou "de la vie" dit Doris)
Du sens que je donnerai à la souffrance découlera mon attitude face à elle. En effet, la souffrance peut être vue de bien des façons :
Elle peut être accueillie presque comme une bénédiction, si je la vois comme un moyen d'expier mes fautes (point de vue devenu de plus en plus marginal aujourd'hui).
- Je peux me dire que "c'est mon lot". Chacun doit prendre une part de la souffrance du monde.
- Elle peut être vue comme un fléau, un mal insupportable. Je suis perdu d'avance et je fuis.
- Si elle n'est pas encore là, je peux avoir peur de l'affronter et cette peur commandera mes comportements.
- Je peux la prendre comme une épreuve, qui, une fois franchie, me fortifiera ; l'utiliser pour la transcender même.
- Je peux refuser l'idée de la souffrance inutile et user de tous les moyens modernes de la science pour la faire disparaître : l'humanité est faite pour le bonheur…
À vous de faire le point ! À chacun de faire son point (et à échanger en Section par exemple).
Bonne lecture.

François COUSIN

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